Il n’est pas toujours nécessaire de partir loin pour être dépaysés : à la fin de l’été dernier, j’ai passé l’une des nuits les plus originales de ma vie… dans le Morbihan, à une trentaine de kilomètres de Lorient. J’ai dormi dans une tiny house au cœur des bois, perdue sur l’immense terrain de la Ferme de Kerbastard. Depuis mon lit face aux grandes baies vitrées, j’ai regardé la nuit tomber sur la forêt, j’ai savouré le silence absolu, l’absence totale de wifi. Le lendemain matin, je me suis goinfrée des produits de la ferme (ce beurre salé !), et j’ai longuement échangé avec Linda et Jean-Marie, les agriculteurs propriétaires.
Rencontrer des producteurs passionnés tout en se reconnectant à la nature, telle est la vocation de Parcel. Ce nouveau concept de slow tourism doit son existence à Géraldine, très vite rejointe par Camille, puis Hervé. Après cette nuit au cœur de la forêt, j’ai immédiatement eu envie de booker mon prochain séjour, et, surtout, d’en savoir plus sur ce qui avait poussé Géraldine et Camille à développer ce concept.
Rencontre avec deux voyageuses, impliquées et passionnées.
Bonjour Géraldine, peux-tu me raconter comment est née l’idée de Parcel ?
Je rentrais d’Australie, où j’avais vécu pendant 7 ans. Je travaillais alors dans le domaine du tourisme. Là-bas j’avais rencontré Camille, qui travaillait pour Moët Hennessy. A mon retour en France, j’étais vraiment en manque de bons produits, j’avais envie de redécouvrir le terroir français : comment on fabriquait un bon vin, un bon fromage... Mais je ne trouvais pas d’hébergement qui offrait à la fois un écrin de nature et une connexion avec les agriculteurs.
En Australie, j’avais connu les tiny houses, et j’avais dans un coin de ma tête cette idée de petite cabane minimaliste, qui véhiculerait les valeurs qui me tenaient à cœur : le respect de l’environnement, mais aussi la possibilité de dormir en pleine nature, dans un espace confortable, en créant du lien avec les agriculteurs.
Camille, comment as-tu rejoint l’aventure ?
De mon côté, je suis rentrée en France avec l’idée de créer ma marque de chocolat bean to bar. Quand j’ai découvert ce que Géraldine avait fait sur Parcel, j’ai trouvé le concept génial. Je l’ai recontactée pour la féliciter, et lui demander qu’elle m’aide à créer l’ADN de ma marque. A ce moment-là, elle était à deux doigts de s’associer avec quelqu’un, mais finalement ça ne l’a pas fait.
On a beaucoup échangé, et on s’est retrouvées sur pas mal de points communs. Ma marque était encore à l’état de projet, je n’avais encore rien lancé, et Parcel cochait tellement de cases qui me parlaient, que j’ai décidé de rentrer dans l’aventure !
Comment as-tu lancé la première tiny house, Géraldine ?
En rentrant en France, j’ai très vite compris que Paris n’était pas faite pour moi, et j’ai déménagé à Bordeaux. A l’époque, on m’a mise en relation avec le syndicat des Vignerons Indépendants, à qui j’ai présenté le projet. J’y ai fait la rencontre de Véronique, viticultrice à Saint-Émilion, qui possédait une grande sensibilité touristique, puisqu’elle était aussi guide sur Saint-Émilion. Elle a adoré l’idée, et elle m’a fait confiance pour construire ma première tiny sur son domaine.
J’étais alors incubée à La Ruche, à Bordeaux, dans le programme des Audacieuses, qui accompagne les porteuses de projet d’entreprises à impact. De fil en aiguille, je suis allée taper à la porte d’une première banque, qui a cru en moi et m’a accordé le prêt pour la construction de la première tiny.
Comment t’y es-tu prise pour construire la tiny ?
J’avais trouvé un petit fournisseur basé dans le Gard, qui a accepté de construire la première tiny alors que je ne lui avais encore fait aucun versement, ça c’est assez fabuleux ! Il nous a accompagnés sur les premières constructions. À cette époque, les tiny commençaient à essaimer, mais les constructeurs les plus connus avaient tous entre six et sept mois de délais, alors que François nous l’a faite en trois mois !
Je voulais vraiment créer un espace confortable, qui puisse être un vrai pied à terre au milieu de la campagne. Le plus simple possible, mais cosy. Je l’ai faite construire en plein Covid, les délais de livraison étaient monstrueux, je ne savais pas comment le marché allait réagir… J’ai vraiment cru tout arrêter là.
Et au final, le Covid a permis de donner un élan plutôt positif à Parcel. J’ai ouvert en juillet 2020, entre les deux confinements, et on a eu un super succès dès l’ouverture.
Camille m’a rejoint fin 2020 et ensemble on a ouvert en Bretagne, en Champagne, dans le Limousin… Puis nous avons rencontré Hervé, l’ex co-fondateur de VeryChic, qui cherchait un nouveau projet, et on l’a pris dans l’équipe pour nous accompagner sur le côté stratégique et financier.
Parcel, ce n’est pas juste dormir en plein nature, c’est aussi partir à la rencontre d’hommes et de femmes passionnés par leur métier… Comment sélectionnez-vous les producteurs ?
Déjà, on recherche des agriculteurs avec des valeurs fortes, en adéquation avec l’engagement environnemental de Parcel. On ne leur vend pas un produit, on crée des partenariats. Ça, c’est hyper important pour nous. L’idée est d’être alignés sur les notions de partage, de passion, et d’envie de recevoir des gens chez eux. S’ils le font juste pour l’argent ça ne marche pas.
Ensuite, on cherche à s’implanter proche des grandes villes puisque l’idée est que les citadins puissent se reconnecter avec le monde agricole facilement, sur une nuit ou un week-end. Donc on essaie toujours de s’implanter à deux heures maximum des grandes villes.
Enfin, on vise si possible des appellations de terroir renommées, puisque le but est que les voyageurs puissent découvrir un terroir. Mais bon, après c’est aussi au cas par cas, on peut tout à fait travailler avec des fermes pour lesquelles on a des coups de cœur, parce que les hôtes sont passionnants, ils ont envie de partager, le lieu est superbe…
Il y a à la fois des critères stratégiques de développement, pour pouvoir répondre aux besoins de la clientèle, mais il y aussi tout l’aspect spontané, au gré de nos affinités.
Vous avez à cœur d’offrir une rémunération plus juste aux producteurs, comment cela fonctionne-t-il exactement ?
L’idée est de s’installer sur des parcelles agricoles qui aujourd’hui ne servent à rien parce qu’elles ne sont ni cultivées, ni utilisées d’une quelconque manière par les agriculteurs. On leur propose donc de rentabiliser ces terrains, en leur dégageant un complément de revenu. L’avantage des tiny houses est qu’elles ont une empreinte environnementale minimale : donc on peut tout à fait s’installer sur une parcelle en jachère pendant quatre ans, quand on s’en va, il n’y a aucune séquelle.
Vu que l’on installe la tiny house clés en main, les agriculteurs n’ont presque pas d’investissement de départ, si ce n’est d’éventuels frais de terrassement pour aménager le terrain quand c’est nécessaire.
Ensuite, le modèle économique est basé sur les commissions : nous prenons une commission sur les nuitées, et une autre, plus faible, sur les extras achetés en ligne : les petits-déjeuners, les visites de la ferme, les locations de vélo… Tous les extras achetés sur place vont directement dans la poche de l’agriculteur. Plus un hôte propose d’extras, plus le modèle est rémunérateur pour lui, et plus l’expérience sera complète pour le client.
On communique aussi sur chaque destination pour mettre en avant les producteurs, et leur procurer de la visibilité. Ce sont des métiers très prenants, donc c’est difficile pour eux de proposer une offre d’hébergement, il faut avoir le temps, les ressources… Nous sommes là pour leur proposer une solution clés en main, à très faible impact environnemental, et avec une dimension humaine très forte.
Vous avez ouvert énormément de destinations en deux ans, quelles sont les prochaines ouvertures à venir ?
Nous allons ouvrir proche de Lyon très bientôt, dans un superbe vignoble. On aimerait continuer à développer le Sud, et on est aussi à fond sur la côte basque, les Landes, la Charente-Maritime… Toutes ces régions qui plaisent de plus en plus !
Nous ne sommes pas trop dans le Nord encore, donc on aimerait bien ouvrir sur la côte d’Opale et en Baie de Somme. Le terrain de jeu assez large !
Pour en savoir plus sur Parcel et booker votre prochain séjour, c’est ici !
Les recos inspirantes de Géraldine et Camille :
Jacky Blot, vigneron à Montlouis-sur-Loire. La rencontre d'un grand monsieur qui prend le temps, peu importe la personne en face de lui, de parcourir toutes ses cuvées avec la même passion. Des vins qui transportent, et une rencontre qui marque et inspire.
Pierre-Édouard Robine, producteur de poiré, et tout l'univers artistique qu’il a créé autour de ses cuvées. La rencontre avec le poiré, un terroir, des acteurs et des savoir-faire en constante mutation. Un élixir encore trop peu connu, pouvant maturer en fût de chenin blanc, mono variétal...
Le podcast Génération do it yourself, et aussi Les Baladeurs des Others, un podcast de récits d’aventure, qui fait voyager autrement !
Génial, trop envie d'essayer l'expérience ! Super découverte, merci Coline 😉